Par Jean-Louis Orlandetti
Les élections… la politique… les passions et espoirs humains…parfois les rêves ; est-ce que tout cela se filme ? Comment l’image peut elle saisir ces ensembles de cultures, d’histoires et d’Histoire, de constructions sociales, qui affleurent et s’affrontent dans leurs particularités tout en créant un espace cinématographique commun ?
Peu de points communs entre les militants de Podemos et un chien italien qui rend compte de la campagne électorale ; un univers sépare les papous de Nouvelle Guinée (dont le verbe invoque Dieu, la nature et les ancêtres) des militants du Comité Central Bonapartiste, analysant un résultat électoral avec un scalpel d’éditorialiste politique ; des modèles de référence totalement étrangers entre un scrutin savoyard et la campagne d’un militant indépendantiste corse.
Pourtant, de la parole qui, en Corse, dissèque les catégories de votants selon les familles ou des stratégies claniques plus ou moins apparentes, au discours idéologique élaboré des militants espagnols en passant par le verbe chamanique tout autant que religieux de la Papouasie, l’image s’organise autour des mots.
Le verbe est au centre de l’image, il occupe l’espace et c’est l’une des rares occasions où le cinéma documentaire asservit systématiquement la caméra au micro. Dans ce dédale d’espoirs, de luttes, de paysages, de communautés différentes, le fil est tendu par le son, par ce qui est dit. La communauté humaine se reconstitue dans son expression orale et les films présentés prennent vie avec leurs mots, leur accent propre, leur élocution particulière. La particularité de ce cinéma est d’utiliser l’image pour mieux faire entendre. La caméra ne s’efface pas, bien au contraire ; elle saisit les paroles dans des cadres qui lui donnent toute sa vie et sa force.
Pour David Lynch : “Le cinéma , c’est un désir très fort de marier l’image au son”. Ce mariage trouve, ici, toute son expression. Cette union dessine le paysage social, culturel et naturel commun du verbe au-delà des particularités et des identités.
Un voyage dans des pays et des problématiques différents, qui capte l’essence du politique : Organiser le commun avec ce que la parole porte de particulier.
L’image de Lynch est le paysage, urbain ou naturel, et le son, celui des paroles des hommes qui l’habitent et le créent.
Un ensemble documentaire qui nous promène dans ces réalités différentes et semblables. Une image cinématographique qui nous donne à entendre le politique dans son individualité.
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Jean-Louis Orlandetti