Allindì propose à des réalisateurs, à des comédiens, des producteurs ou des personnalités de sélectionner trois films issus de notre catalogue et d’expliquer, à nos abonnés, les raisons de ce choix.
→ Ce mois-ci, c’est au tour de Léonor Husson, membre de l’ATCAC (association des techniciens du cinéma et de l’audiovisuel de Corse) et assistante caméra de fiction depuis 2013 de se prêté au jeu :
Etre assistante caméra, c’est faire partie de l’équipe caméra. On est en général 3 assistants pour un cadreur, un 1er, un 2nd, un 3ème, avec des tâches très précises. Il peut bien sûr y avoir plusieurs caméras sur un film, auquel cas, le 2nd doit aider plusieurs opérateurs en même temps. Notre mission, c’est donc de garantir le fonctionnement de la caméra en toutes circonstances pour laisser le cadreur ou la cadreuse faire son travail correctement: faire les plans. Ca implique de gérer l’ensemble du matériel et tout l’aspect technique : régler et paramétrer la caméra (balances blancs, fréquence image, résolution, encodage…), installer et faire fonctionner les accessoires nécessaires selon les situations (matte box, moteurs de point, loupe longue, splashbag etc), changer les objectifs à la demande du chef opérateur, installer les filtres… La liste est longue !
Les Exilés, de Rinatu Frassati
« Les Exilés », c’est le premier court-métrage de Rinatu Frassati. Et on peut dire
qu’il a fait fort. Se lancer d’emblée dans la réalisation d’un film d’époque, avec
tous les enjeux que ça implique, ce n’était pas une mince affaire.
Les Exilés, c’est un film d’aventure palpitant tenu par d’excellents acteurs
insulaires, avec de superbes costumes, des armes, des chevaux, des cascades et
des décors finement travaillés. Le succès a été au rendez-vous avec un accueil
très enthousiaste à sa sortie en salles. J’étais assistante caméra aux côtés de Laura Sanguinetti sous la direction du chef opérateur Yves Agostini. Ma mission était de veiller au bon fonctionnement de tout le matériel caméra, d’installer les retours vidéo pour le réalisateur et surtout faire les back-up, c’est-à-dire copier et sécuriser les rushs réalisés chaque jour sur des disques durs. C’est une des plus grosses responsabilités du second assistant caméra. La particularité de ce tournage, c’est que nous avons tourné essentiellement en extérieur dans des décors pas faciles d’accès (et sans électricité !). C’était la surprise tous les jours, il faut s’adapter aux lieux. Mais c’est ce qui a fait de ce tournage un excellent souvenir pour toute l’équipe et une réelle aventure humaine.
Ensuite, le film Béatrice, de Rinatu Frassati
Pour son 2ème court métrage, Rinatu Frassati a dû se dire : « On prend les
mêmes et on recommence ». Nous étions tous très heureux de rééditer
l’expérience avec un réalisateur aussi talentueux et ambitieux dans ses réflexions artistiques. Cette fois, rien à voir avec « Les Exilés » qui a été tourné à 99% dehors. « Beatrice » est à 99% un huit-clos, une histoire d’amour énigmatique et passionnelle tournée entièrement dans un hôtel de Balagne, où passé et présent se mélangent. A l’équipe caméra et lumière, nous avions la mission de retranscrire à l’image l’époque de l’après-guerre. Yves Agostini, le chef opérateur, a fait le choix audacieux d’utiliser pour sa lumière des Cremer, véritables projecteurs d’époque, fabrication française des années 50. Un soin tout particulier a été apporté à l’étalonnage du film, dont une partie est d’ailleurs en noir et blanc.
« Beatrice » est un film qui ne peut pas laisser indifférent, et dont la musique
enivrante résonnera longtemps dans votre tête.
Et pour finir, Au commencement d’Isabelle d’Olce
Encore un court-métrage d’époque ! Honnêtement, pour nous techniciens, et j’imagine à quel point ça doit être vrai pour les comédiens, il y a un certain plaisir à évoluer sur un plateau de cinéma où règne l’anachronisme. Poser l’Alexa sur la Dolly, installer les HMI, calculer l’hyperfocale avec son iphone, mettre des marques au gaffer fluo (etc) au beau milieu d’un magnifique décor subtilement reconstitué où déambulent des acteurs costumés sortis tout droit du 18ème siècle, c’est toujours assez amusant.
« Au commencement » porte bien son nom et raconte l’enfance d’un jeune
Corse destiné à changer le cours de l’Histoire. J’ai une anecdote rigolote sur ce film. L’histoire se passe en été, mais comme souvent, on ne tourne pas du tout à la même saison, et le tournage a eu lieu à Ajaccio en plein hiver. Normalement, aucun problème, Ajaccio c’est pas Megève. Sauf que cette année-là, premier matin de tournage : il avait neigé 30 cm pendant la nuit. Le plan de travail a été entièrement modifié à la dernière minute pour échanger l’ordre des scènes entre intérieur et extérieur pour laisser à la neige le temps de fondre.
Le maître-mot au cinéma, c’est s’adapter. Surtout à la météo !
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